« Oublier ses ancêtres, c’est être un ruisseau sans source, un arbre sans racines » nous dit un proverbe chinois.


Établir la généalogie d’une famille, qu’elle soit modeste ou notable, c’est reconstituer à travers les siècles la succession des générations.

Science de la filiation, la généalogie est devenue l’un des loisirs préférés des Français : selon une étude réalisée pour le site Filae.com en 2016, 87% des Français de plus de 18 ans sont intéressés par la généalogie, notamment les femmes et les plus de 50 ans, et aujourd’hui de plus en plus de jeunes gens.

Pour ¾ des Français, la généalogie représente une quête de sens et un devoir de transmission. Cependant, malgré cet intérêt ,42% ne sont pas capables de donner les nom et prénom d’un seul de leurs arrière-grands-parents, 30% ne peuvent n’en citer qu’un seul ou deux. Seuls 11% réussissent à le faire pour au moins cinq de leurs aïeuls.

La généalogie est un paradoxe :

Elle n’a ni langage ni technique qui lui soient propres. Elle est à la fois une science, celle de la recherche sur la filiation d’une famille, et un simple loisir s’intéressant à toutes les activités humaines, loisir que l’on pourrait qualifier de « touche à tout ». C’est une science car elle permet au chercheur d’avancer de génération en génération, pour retrouver ses ancêtres Un Français sur deux a déjà fait des recherches à titre personnel dont un tiers sur internet. 57% déclarent qu’un membre de leur famille a déjà fait des recherches généalogiques. La généalogie semble néanmoins pour la majorité un passe-temps difficile. L’ampleur de la tâche, la difficulté d’accès aux documents et le manque de temps sont autant de repoussoirs à cette quête, et pour 4 personnes sur 10, elle est même réservée à des spécialistes. Pour 64% internet est indispensable pour faire des recherches, pour 17% il est même ce qui leur a donné envie de démarrer leurs premières recherches.

Et ses racines, par des raisonnements logiques et l’étude de documents. « Touche à tout » car dresser son arbre généalogique, c’est explorer la géographie, l’histoire, les langues anciennes, le quotidien des populations d’hier (leurs possessions, leur niveau économique)…

Partir à la recherche de ses ancêtres consiste à faire œuvre de sociologue, d’ethnologue, de démographe et d’historien ; c’est découvrir que l’individu n’existe pas sans une myriade d’autres qui, se rassemblant, mêlant leur sang, composant de nouvelles alliances, brassent le patrimoine humain et donnent un vrai sens à la notion de peuple de la Terre.

Autrefois la généalogie avait le rôle de légitimer le pouvoir ; les chercheurs ne travaillaient que sur les familles de gouvernants, monarques et seigneurs, avec des documents approximatifs car il fallait flatter l’ego en reliant les branches vivantes à des filiations imaginaires, voire mythologiques. Les marchands de merlettes (la merlette est un oiseau stylisé sans bec ni pattes qui apparaît sur l’écu des Croisés) pouvaient ainsi présenter à qui les payait correctement des rameaux remontant aux dieux… la généalogie servait alors à diviser les castes, à rendre étanches les cloisons séparant les nobles des bourgeois et les bourgeois du peuple.

«  À qui est homme d’honneur, ne lui demande pas sa généalogie », proverbe espagnol

Les écrivains ont utilisé les complexités familiales comme trame sur laquelle bâtir un roman, le plus bel exemple étant Émile Zola et son œuvre monumentale les Rougon Macquart, dans laquelle il a élevé la généalogie au rang de véritable personnage de son histoire. On peut aussi citer Maurice Druon et  Les grandes familles  ou Marguerite Yourcenar dans ses Souvenirs pieux  ou les Archives du Nord. Et Montaigne nous dit : « Quel contentement me serait-ce d’ouïr quelqu’un qui me récitât les mœurs, le visage, les plus communes paroles et les fortunes de mes ancêtres. Combien j’y serais attentif ! Vraiment cela partirait d’une mauvaise nature d’avoir à mépris les portraits de nos prédécesseurs. »

Il faut du temps pour mener à bien une recherche généalogique, le principe fondamental de la généalogie est qu’une découverte appelle une autre recherche ; c’est travailler sur des documents ordinaires et d’autres extraordinaires ; la limite des découvertes n’existe pas, personne ne pourra un jour avoir « terminé » sa généalogie, ce serait se mentir à soi-même ; la recherche commence comme un hobby et se transforme vite en passion car travailler sur son arbre, c’est travailler sur des personnages et sur des vies entières. La quête personnelle se mue en voyage dans le temps et dans la grande Histoire…

 

Publié par Virginie Savoye